Impact², rendez-vous des acteurs de l’Impact Investing


le 30 avril 2012 dans Actualités, Entreprises, Impact social, Pro Bono - No comments

Organisée par le Comptoir de l’Innovation[i] et Social Capital Markets[ii] le 11 avril dernier à l’Hôtel de Ville de Paris, la rencontre impact² a réuni plus de 700 participants, professionnels de la finance et de l’entrepreneuriat social autour de la thématique du financement des entreprises sociales en France et dans le monde, notamment via l’Impact Investing.

L’Impact Investing désigne le marché naissant des investissements dans des projets à vocation sociale et/ou environnementale, ayant un objectif de double rentabilité, économique d’une part, sociale de l’autre[iii]. Ce secteur intéresse donc à la fois les investisseurs et les entrepreneurs sociaux, et leur offre un terrain de convergence malgré leurs différences préalables.

 

Entrepreneurs et Investisseurs sociaux, regards croisés

Luc Balleroy, Directeur Général d’Opinion Way, a notamment présenté les résultats de l’enquête menée conjointement avec le Comptoir de l’Innovation, sur l’image que les investisseurs et les entrepreneurs sociaux ont les uns des autres. L’image réciproque est très positive, les entrepreneurs et investisseurs se considèrent mutuellement comme deux partenaires, apportant chacun des compétences complémentaires pour la réussite d’un projet. Même leurs objectifs de rentabilité convergent, autour de 5%.

Et cette rentabilité est indispensable pour attirer de nouveaux investisseurs vers le secteur de l’Economie Sociale et Solidaire (ESS). A l’heure à laquelle les financements publics sont en baisse, l’ESS a besoin de lourds financements : l’enquête OpinionWay déclare un besoin de €2,6m en moyenne pour une entreprise sociale[iv]. Ces fonds sont essentiellement dédiés à des projets de développement de produits ou de service et à des changements d’échelle, dans un secteur particulièrement dynamique.

Websourd, par exemple, est voué à développer, grâce aux nouvelles technologies, des solutions permettant aux personnes sourdes et malentendantes d’être mieux intégrées à la société. Cette entreprise s’attèle à montrer l’exemple : la langue des signes est le langage dans l’entreprise, au sein de laquelle 50% des salariés sont sourds. Malgré les difficultés du secteur, François Goudenove, Président, prouve son dynamisme en déclarant la « nécessité d’être ambitieux : avec 500 000 personnes sourdes en France, il y a encore beaucoup à faire ». Et à lui de citer un projet en cours, représentatif de sa vision : le développement d’avatars parlant en langue des signes sur les écrans dans les gares en France pour diffuser les annonces en direct, projet extensible au monde entier. Un fort potentiel donc, mais un aussi fort besoin de financements.

L’Impact Investing, une zone de convergence possible

Le marché de l’Impact Investing est une des réponses à ce besoin de l’ESS. Regroupant l’ensemble des investissements rentables à impact social et/ou environnemental positif, l’Impact Investing n’est pas, comme on pourrait le croire « seulement un enjeu de communication », selon Peter L. Scher, Vice Président Exécutif de JP Morgan Chase & Co, en charge de l’entité Social Finance du groupe. L’intérêt économique est réel, et se joue sur le terrain des nombreux challenges sociétaux à remplir pour favoriser la croissance économique : l’Impact Investing a le potentiel de devenir un levier de croissance, et tout investisseur aura tout intérêt à être de la partie à l’avenir. Il n’est cependant pas non plus un moyen de diversification du risque financier (« maybe one day »), car l’aspect social d’un investissement pourrait être perdu s’il était intégré à un portefeuille traditionnel. L’Impact Investing est donc bien un marché hybride, encore à l’état de niche.

Afin de se développer il lui sera nécessaire de surmonter les freins évoqués dans l’enquête Opinion Way. D’un côté, les entrepreneurs sociaux jugent trop haute la rentabilité exigée par les investisseurs et se méfient du monde de la finance, opaque à leurs yeux. De l’autre, les investisseurs méconnaissent le secteur de l’ESS sur les plans juridique et économique et se méfient de l’objectif social, qui pourrait nuire à leur objectif de rentabilité. Les freins, malgré un attrait certain, sont donc la méconnaissance et la méfiance mutuelles. Le risque engendré est ainsi l’absence de rencontre entre offre et demande de financement au sein du secteur.

Pour arriver à une meilleure complémentarité entre investissement et financement, il semble donc nécessaire de faire de l’Impact Investing un véritable marché. Oui, mais comment ?

Comment faire évoluer l’impact investing en un véritable marché ?

  • Poser les bases d’un cadre légal (Grégoire Schöller, Membre du cabinet de Michel Barnier, Commissaire européen en charge du Marché intérieur et des services) : Pour que le marché naissant émerge dans de bonnes conditions, il est nécessaire de construire l’environnement juridique adéquat.
  • Repenser les processus d’investissement (ibid) afin d’y intégrer les enjeux de l’ESS, notamment en développant un système commun de notation extra-financière, ou en définissant précisément les scénarios de sortie, etc.
  • Développer des outils adaptés (Opinion Way) : Pour favoriser la rencontre des investisseurs et porteurs de projet, il semble nécessaire de développer des réseaux les mettant en relation, ainsi qu’une plate-forme web d’intermédiation financière dédiée, en parallèle des plateformes traditionnelles, pour diffuser les risques liés au financement.
  • Lui donner plus de visibilité (Penelope Douglas, Présidente du Conseil d’Administration de SOCAP) : Le contexte actuel est une belle opportunité pour l’Impact Investing, mais afin de survivre aux vingt prochaines années et d’acquérir une visibilité à grande échelle, il va devoir devenir « beaucoup plus sexy ».
  • Intégrer les jeunes au processus de création (Kim Wahl, Fondateur de IK Investment Partners) : le développement de l’Impact Investing dépend des jeunes qui, éduqués et dynamiques, sont indispensables à sa construction.

Et à Nicolas Hazard, Président du Comptoir de l’Innovation, de conclure :

Nous sommes au début du « mouvement mondialisé » de l’Impact Investing au service de la lutte contre la pauvreté. Ce nouveau segment de marché, n’est ni de la philanthropie, ni du financement traditionnel, mais bien entre les deux. Aujourd’hui, « tous les moyens sont réunis pour passer à l’action » et saisir cette opportunité. Qu’attendons-nous ?

La rencontre impact² en vidéo, par Vidéaux :

Pour en savoir plus sur impact² c’est ici.

 


    

[i] Fonds d’investissement français en entrepreneuriat social
[ii] Réseau américain d’entrepreneuriat social
[iii] Sur ce sujet, voir l’article , basé sur les études de JP Morgan «Impact Investing, an emerging asset class», Nov 2010 et « Insight into the Impact Investment market », Déc 2011.
[iv] Ce chiffre semble évalué à la hausse car les entrepreneurs sociaux interrogés ont des structures déjà de taille importante.

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