Le nombre de fondations et fonds de dotation créés par les entreprises est en constante progression depuis 2003, avec la volonté de s’engager financièrement et d’engager les collaborateurs sur des projets d’intérêt général. Si leurs formes, modalités d’action et champs d’intervention sont nombreux et variés, il est aujourd’hui un enjeu stratégique commun à l’ensemble de ces structures : celui de l’évaluation, tant des projets soutenus que des structures elles-mêmes. Où en est-on concrètement ? Cette pratique est-elle réellement en voie de généralisation ?
Fondations et fonds de dotation créés par les entreprises : quelles sont les tendances actuelles ?
Le « Panorama des fondations et fonds de dotation créés par des entreprises » présenté le 25 septembre dernier au siège d’EY retrace les grands résultats d’une étude sur le secteur conjointement menée entre EY et IMS-Entreprendre pour la Cité. Les recherches ont notamment abouti au constat suivant : si le nombre de fondations et fonds de dotation créés par des entreprises est en constante progression depuis plusieurs années, leur part, représentant 20% du paysage philanthropique français, reste minoritaire. De manière globale, les fondations et fonds de dotation restent majoritairement rattachés à la présidence ou direction générale de l’entreprise mais se voient de plus en plus inscrits dans une stratégie RSE globale, avec comme domaines d’intervention principaux l’action sociale, l’insertion professionnelle et l’éducation.
En ce qui concerne les ressources humaines, on estime aujourd’hui à 2,5 l’effectif moyen au sein des structures avec dans 85% des cas, des salariés « détachés » de l’entreprise au service de la fondation ou du fonds de dotation, ce qui traduit les liens étroits que souhaitent garder les entreprises fondatrices avec leurs entités. Aujourd’hui, 70% des structures en moyenne proposent aux collaborateurs de l’entreprise de s’impliquer dans les projets sous un format mixte, c’est-à-dire à la fois sur leur temps de travail et leur temps libre. En revanche, deux tiers des entreprises affirment ne pas profiter du système de défiscalisation des heures de travail, et ce pour des raisons diverses : processus trop complexe, nombre de salariés impliqués pas assez important ou tout simplement manque de volonté de l’entreprise.
Une nouveauté en France depuis 2008 est également l’émergence des fonds de dotation, souvent créés en complément des fondations d’entreprises. Ils permettent notamment d’élargir le champ des donateurs : le fonds de dotation « Les petites pierres » créé par la Fondation Somfy permet ainsi selon Vincent Defrasne, Directeur de la Fondation Somfy, de « collecter les fonds des particuliers et donc de démultiplier l’engagement ». La Fondation d’entreprise Accor a quant à elle basculé vers le fonds de dotation Solidarity Accor précisément pour « capter de nouvelles opportunités et bénéficier d’une plus grande marge de manœuvre » explique Christine De Longevialle, Déléguée générale de Solidarity Accor.
La démarche d’évaluation est-elle en voie de devenir une pratique naturelle ?
Si les fondations et fonds de dotation souhaitent être légitimes aux yeux de leurs entreprises mères, il est indispensable qu’ils mettent en place une démarche d’évaluation afin d’appuyer avec des résultats qualitatifs et quantitatifs les impacts réels de leurs actions. Là dessus, 67% des structures interrogées disent avoir recours à une démarche d’évaluation, et près de la moitié de celles qui ne la pratiquent pas indiquent que le processus est en marche.
Néanmoins, si la majorité des fondations et fonds de dotation semble être convaincue par les bénéfices d’une telle démarche, les pratiques réelles se traduisent aujourd’hui davantage en terme de vision vers laquelle on tend que d’objectifs clairement définis. Nils Pedersen, Responsable veille, développement et évaluation au sein de la Fondation d’entreprise EDF, explique par exemple que «l’évaluation est un état d’esprit plus qu’un processus, une ambition modeste mais résolue » au sein de la Fondation.
Le manque de temps est notamment un frein majeur à la mise en place d’un système d’évaluation des projets soutenus ou de la structure elle-même. 78% des fondations et fonds de dotation interrogés l’invoquent comme principal obstacle à la démarche, devant le manque de moyens pour 38% des répondants. Pourtant, l’évaluation peut commencer par des outils simples tels qu’une grille d’instruction de projets, des données de suivi recueillies de façon structurée ou encore un bilan du partenariat avec l’association soutenue. Ces premières briques, souvent posées de manière automatique à l’origine de la création de la structure, sont autant d’apports indispensables pour expliciter l’action réalisée pendant l’année. Il suffit ensuite de les rationaliser et de les mettre en valeur pour en dégager une plus-value réelle, en terme de communication ou d’amélioration des pratiques.
La volonté généralisée des fondations et fonds de dotation à évaluer leur activité est donc très encourageante. Elle a en effet le mérite d’inscrire les structures dans une logique de croissance, d’amélioration et de pérennité. Les motivations sont en effet indéniables : nécessité de rendre des comptes et de justifier les moyens consacrés à la fondation ou au fonds, mesurer les impacts réels des projets soutenus, mieux communiquer ou encore améliorer le pilotage quotidien des activités. Reste ensuite à se retrousser les manches, et ne pas hésiter à s’inspirer des bonnes pratiques déjà en places au sein des structures visionnaires en la matière.
Aurore Fijalkowski, Chargée de développement chez Pro Bono Lab
Pour aller plus loin :
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– Colloque sur le mécénat de compétences : des pistes d’action et de réfléxion, Juliette Didier Champagne
– Mécénat de compétences : observer en détail pour encourage la pratique, Sarah Digonnet
– Introduction à la notion d’impact social : origines et définitions, Muriel Gipouloux
Ressources utiles :
– Pour retrouver tous les résultats de l’étude