Les associations dans les transitions des mondes


le 29 novembre 2012 dans Associations, Génération Y, Réflexions - No comments

Le jeudi 22 novembre dernier s’est tenu le séminaire de prospective de la Fonda « Les transitions des mondes » auquel a assisté Pro Bono Lab. Ce séminaire s’inscrit dans le projet de la Fonda « Faire ensemble 2020 » qui a pour but d’identifier et de comprendre les transformations sociales à l’oeuvre.

Lors du séminaire, Fabienne Goux Baudiment, Directrice du bureau d’étude, de recherche et de conseil en prospective ProGective, a montré que notre monde était en rupture. Elle a exposé les principaux changements qui pouvaient s’observer aujourd’hui dans nos sociétés. Exercice de prospective pour en déduire une projection du secteur associatif à moyen terme.  

Un monde de complexité et d’incertitudes

Le monde est de plus en plus incertain, l’« ancien »  monde tend à disparaître et le nouveau, qui peine à émerger, porte avec lui les stigmates de profonds changements : digitalisation, robotisation, vieillissement de la population, urbanisation, changement climatique… Autant de mutations qui affectent la population, ses repères et ses neurones, l’économie, la conception des politiques et qui invitent à réfléchir.

Assistons-nous à une individualisation profonde du monde ? La paix vient-elle remplacer la guerre ? Le gouvernement sera-t-il mondial ? Allons-nous survivre à la robotisation et à la création de l’intelligence artificielle ? Selon l’intervenante, nous serions en chute libre, ce qui entraîne dans la population une certaine crispation. Toutefois, elle relativise son propos en signalant qu’en temps de crise et de transition, les menaces s’accompagnent aussi d’opportunités.

Génération « no future »

Une des caractéristiques du monde actuel se cristallise autour du profond mal-être de la jeunesse. Lequel proviendrait selon Fabienne Goux-Baudiment d’un sentiment de confinement dans des schémas sociaux, familiaux et professionnels qui ne fonctionnent plus. Elle énumère quelques signes de mal-être observés chez cette jeunesse et induits par les conditions de vie favorisant le stress : obésité, échec scolaire, suicides… Nous ne serions plus capables de générer de l’espoir et du rêve car tout serait devenu possible.

Ces jeunes ont des possibilités infinies parmi lesquelles choisir : ils peuvent choisir quelles études suivre, où travailler dans le monde, avec qui se mettre en couple ; mais ces possibilités ne sont pas toujours de vraies opportunités. En effet, cette génération se trouve dans un monde en crise, aussi bien économique que culturelle…

Aujourd’hui, après avoir fini leurs études, de nombreux jeunes du monde occidental ne trouvent pas de travail. Plusieurs d’entre eux partent à l’étranger (ici, une autre mutation : des migrations croissantes), en perdant leurs liens familiaux et sociaux, et parfois, sans succès. Ce qui provoque une immense déception et désorientation. Aussi doit-on mentionner ceux qui ne peuvent même pas choisir, par manque de ressources. Lesquelles sont nécessaires pour accéder au monde des possibilités, et, avec de la chance, au monde des opportunités.

D’une civilisation à une autre ?

La croissante « technologisation » est en train de changer notre monde (notre vie, nos outils, nos manières de communiquer, de voyager, de travailler, de penser…). Allons-nous remplacer les êtres humains par des machines ? Existe-t-il des limites sociales à la « technologisation » ? Et des limites morales ? Ces questions restent sans réponse pour le moment, mais nous pouvons identifier déjà quelques mutations importantes. Selon Fabienne Goux-Baudiment,  nous nous trouvons dans une période de transition où l’on passe d’un « monde 1.0 » à un « monde  2.0 », qui se traduit par les changements suivants :

  • Monde 1.0 : efficacité - rationalisation - spécialisation - logique, déduction - compétition - savoirs analytiques
  • Monde 2.0 : plaisir, bonheur - émotions, empathie - intégration, fusion - intuition, créativité - coopération - savoirs synthétiques, synergétiques

De la guerre à la paix ?

Il semblerait que l’Occident soit la partie du monde la plus pacifique. Bien que la guerre ait été le moteur de l’histoire, le monde occidental évolue depuis ces 50 dernières années sans affrontement sanglant. Mais cette absence de guerre signifie-t-elle pour autant l’absence de confrontations et de conflits ? Peut-être sommes-nous passés de la guerre des armes à une guerre plus difficile à identifier, à savoir une guerre financière entre pouvoirs. Les guerres modernes ont eu lieu entre des États-nations, ou à l’intérieur des États-nations, mais aujourd’hui, existe-t-il toujours des États-nations ?

Enfin il est aisé d’observer une autre mutation dans nos sociétés postmodernes : la banalisation de la violence. Il s’agit de la virtualisation de la violence, laquelle serait évacuée de la vie quotidienne pour se vivre dans les jeux vidéo. Néanmoins, nous pouvons poser une question : si la violence est réduite à la représentation, cela ne conduira-t-il pas à une certaine sacralisation de la violence ?

Quel avenir pour les associations ?

Nous avons mentionné seulement quelques mutations dont nous avons discuté lors du séminaire, mais il en existe beaucoup plus. Dans ce contexte de changements sociaux, économiques et politiques qui produisent des mutations dans notre monde et notre vie, quelle est la place pour les associations ? Si les associations ont pour but de répondre aux besoins et aux intérêts sociaux et si elles sont créées par et pour la société, comment peuvent-elles être affectées ?

Si nous reprenons la thématique de la jeunesse, nous pouvons observer que les jeunes et notamment cette « génération no future » est très engagée dans les associations. La jeunesse d’aujourd’hui a une grande conscience des problèmes sociaux. En revanche, nous pouvons nous demander si réciproquement, les associations prennent en compte les problèmes de la jeunesse actuelle ? Sont-elles ouvertes à la participation et au recrutement de ces jeunes ?

Par rapport aux changements technologiques, les associations et les organisations traditionnelles plus largement semblent devoir s’adapter aux nouveaux outils informatiques ou « 2.0 » pour pouvoir survivre et se connecter au monde. Cependant, nous pouvons constater que les associations sont par définition plus préoccupées et occupées par les questions de changement et de besoins sociaux que par les innovations de la production.   

Mais finalement, par rapport aux conflits sociaux, les associations s’adaptent bien. Il ne faut pas toujours pointer les « inadaptations » des associations car c’est précisément le secteur associatif qui s’adapte toujours le mieux aux besoins ou aux conflits des sociétés. Dans ce sens, les associations doivent continuer leur activité où les pouvoirs publics et le secteur productif  échouent.  

Pour aller plus loin :
Lire l’article « Prospective : associations et mutation des sociétés »  
Visiter le site de la Fonda

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