Arrivées en France en 2009, ces mini-usines organisées en réseau sont en pleine expansion. Technologique, connecté, et collaboratif, le Fab Lab représente le symbole d’un monde en mouvement. Aperçu de ces lieux d’effervescence souvent méconnus du grand public.
Un crédo : do it yourself !
Créer des objets au lieu de les acheter, c’est désormais possible dans les Fab Labs. Contraction de « Fabrication Laboratories », un Fab Lab est une plate-forme de prototypage rapide qui regroupe un ensemble de machines à commande numérique. Imprimante 3D, découpeuse laser, ou fraiseuse numérique, ces ateliers visent des performances comparables aux équipements industriels tout en gardant un positionnement proche de l’artisanat. Ainsi, chacun peut venir tester une idée personnelle, concevoir des objets uniques, réparer ou « customiser » des objets existants.
On peut ainsi croiser étudiants, retraités, ingénieurs, designers ou simples amateurs travailler ensemble pour faire avancer leurs projets. Véritable carrefour d’idées, le Fab Lab est un lieu de partage et de collaboration avec un mot d’ordre « Do it yourself, do it with others (Faites-le vous-même, faites-le avec les autres).» Le but est d’encourager la créativité individuelle tout en répondant à un principe de « fertilisation » des cerveaux qui vise à mettre en commun des connaissances et des compétences.
Apprendre par le partage de compétences
Un des principaux objectifs du Fab Lab est de donner aux citoyens un accès aux connaissances techniques et aux outils nécessaires pour comprendre comment un objet est fabriqué, comment le réparer ou le modifier. Bref : se réapproprier des connaissances techniques jusque là peu accessibles au grand public. L’expérimentation en commun où interagissent des personnes d’horizons différents permet de créer un terreau fertile pour l’innovation. Il s’agit d’apprendre en faisant avec d’autres qui ont déjà appris dans le Fab Lab ou ailleurs.
Dans cette communauté d’utilisateurs, il n’y a pas d’assignation de rôles : chacun est invité à partager ses connaissances avec les autres, et il est fréquent que des projets soient menés dans un engagement mutuel où les membres de la communauté peuvent apprendre en partageant informations et compétences.
Le Fab Lab est donc une plate-forme d’innovation où chaque utilisateur se réapproprie les moyens de production. Dans le milieu, on les appelle les « makers ». L’idée est vraiment de s’ouvrir à tous et de démocratiser l’innovation en faisant circuler les connaissances et les idées de chacun, créant ainsi une réelle communauté à l’échelle mondiale.
L’innovation par tous, et pour tous
L’innovation ascendante, décentralisée et ouverte a été favorisée par l’internet qui a considérablement abaissé les barrières à l’innovation en permettant à de nombreuses personnes de créer, échanger et de devenir actrices. Selon un rapport du NESTA (un centre de recherche Britannique dédié à l’innovation) il y aurait 2 à 3 fois plus d’innovation de la part des consommateurs qu’il n’y en a dans l’industrie.
On compte plus de 500 Fab Labs dans le monde, dont une cinquantaine en France, et le nombre continue de doubler chaque année. Ils sont regroupés en réseau de manière à permettre à la communauté de créer un capital commun. Des centaines de milliers de design d’objets sont disponibles grâce à des outils open source comme Arduino. Conçus de manières participatives, les projets sont plus facilement appropriables par les populations plus ou moins proches. Toutes les inventions sont publiques, donc améliorables à l’infini et adaptables aux désirs et besoins.
Une diversité des modèles économiques
Il est important de ne pas négliger la partie économique et financière lorsque l’on crée un FabLab afin que ce dernier soit pérenne. En effet, toute création engendre des coûts et des investissements non-négligeables à prendre en compte à court et long termes. Si l’on souhaite être agréé à la Charte du MIT, le projet de création d’un Fab Lab demande un investissement particulier pour financer les machines nécessaires.
La viabilité économique des Fab Labs repose essentiellement sur des flux de revenus qui peuvent se composer de différents éléments :
• Une offre de service comprenant la location de l’espace et/ou des machines avec une aide personnalisée d’un des Fab Managers pour permettre à quiconque de travailler sur un projet de manière confidentiel.
• Des formations ou ateliers pour appréhender les outils de base du Fab Lab (Imprimantes 3D, logiciels, petite électronique)
• Un système d’abonnement avec des forfaits sur-mesure adaptés aux besoins des utilisateurs.
Chaque Fab Lab organise un planning pour la semaine en fonction de la demande en s’assurant de toujours garder des créneaux où le lieu reste ouvert à tous et de manière totalement gratuite.
Grâce à l’appui de machines puissantes, accessibles facilement les Fab Labs sont des endroits magiques où se fait, se défait, se pense le monde de demain. Aujourd’hui, ces espaces de création sont probablement la première pierre qui permet de démocratiser la « fabrication personnelle » où l’ensemble de la chaine de production peut être maitrisée par une seule personne. Certains membres de la communauté des « makers », pensent par ailleurs que les Fab Labs sont les ateliers ouverts du XXI siècle. Le coût financier d’accès pour un utilisateur est faible et permet d’abaisser sensiblement les barrières à l’innovation. Preuve de cet engouement, le gouvernement s’est penché sur la question avec un appel à projet l’été dernier. Résultats : 14 lauréats pour 154 dossiers provenant de 23 régions !
Guillaume Deschamps, chargé de partenariats chez Pro Bono Lab
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