Entreprises et responsabilité : de la théorie à la pratique


le 12 octobre 2011 dans Entreprises, Pro Bono, Réflexions politiques et citoyennes - No comments

Des liens étroits unissent les entreprises et la société civile et politique. La crise économique actuelle, dont les effets se font durement sentir dans de nombreux pays, illustre à la fois cette relation d’interdépendance et la nécessité de créer des liens moins tendus, plus volontaires, pour le bien commun.

A la théorie de l’agence, maximisant les profits pour l’un et distribuant le reste aux autres agents, c’est aujourd’hui la théorie des stakeholders qui déterminerait le fonctionnement optimal d’une organisation : elle défend la satisfaction de tous les agents ou groupes d’intérêt commun. 

Pour satisfaire un nombre plus large d’intérêts au sein d’une organisation, les entreprises ont commencé à réfléchir à la pertinence stratégique des actions socialement responsables. L’état d’avancement de la RSE varie selon les pays, et plus encore selon les secteurs et les entreprises. Le mécénat de compétences est connu dans certains secteurs, voire presque traditionnel. Dans certains cas, il est un pilier de la stratégie, au même titre que les programmes de diversité et d’inclusion ou les comités de développement durable. 

Pourquoi cette évolution? 

Des études révèlent à quel point les entreprises qui ont mis en place la RSE au sein de leur activité bénéficient d’avantages compétitifs sur leurs concurrents. Dans ce cadre, beaucoup se sont intéressées au volontariat d’entreprise comme une facette intéressante de l’engagement pour la communauté, favorisant notamment l’innovation. Théorie et pratique, acte et parole, expérience et trace écrite forment un couple solide. La recherche suit le réel, ou le précède, et le rend plus réel en publiant un acte isolé, en le rendant reproduisible, en cherchant ses mécanismes. Elle fait d’un acte isolé une piste sérieuse, et éloigne le spectre de l’effet de mode.

En termes de management stratégique, les entreprises définissent souvent l’avantage compétitif par la capacité à créer une valeur qui n’est pas possédée par les concurrents ; cette stratégie est dite durable tant que les autres ne peuvent l’imiter ou en retirer les mêmes avantages. Aujourd’hui, le partage, l’open source, la « wikisation » de la connaissance est une nouvelle stratégie : les meilleurs compétiteurs d’un marché montrent leurs avancées afin de prouver leur qualité. Jusqu’à la fin du XXème siècle, le management stratégique pensait que les ressources d’une entreprise au sein d’un secteur particulier étaient homogènes. D’où la focalisation des entreprises sur les avantages compétitifs externes, la part de marché (Porter, 1982). La théorie des ressources et capacités (Penrose, 1959) prend une focale nouvelle, interne, et décrit la création de l’avantage compétitif comme la combinaison optimale des différentes ressources à portée de main pour créer la possibilité, le développement de l’adaptation à l’environnement extérieur et à ses mutations. Dans cette optique, le volontariat d’entreprise participe notamment au développement des compétences des salariés et contribue clairement à générer un avantage compétitif.

Au-delà de cette théorie, et bien que le volontariat d’entreprise manque encore de bases théoriques et de données précises, il correspond néanmoins au schéma général. La théorie des stakeholders aide à comprendre la RSE, qui est aussi une illustration de la théorie de l’échange social. Cette théorie de sociologie très économique pense que les relations humaines sont faites de coûts et de bénéfices, et de comparaisons avec d’autres alternatives. Il s’agit d’équilibre entre ce qui est donné et ce qui est reçu, et avec l’idée que l’on se fait des relations que l’on mérite. L’importance grandissante d’autres parties prenantes dans le jeu économique et l’attente qu’ils expriment est palpable. De plus en plus, la responsabilité de l’entreprise n’est pas seulement de créer du profit, c’est aussi d’intégrer des considérations sociales à leur activité, pour atteindre alors un triple objectif : social, économique et environnemental. C’est la théorie de la triple bottom line. Enfin la théorie de la légitimation est au cœur du volontariat d’entreprise : l’environnement offre un panorama du comportement attendu des entreprises, des règles plus ou moins explicites qu’elles doivent suivre pour être socialement approuvées et légitimées. Cette théorie aide aussi à comprendre la pression croissante de l’environnement extérieur sur les entreprises, sur leur produits et services ou la manières qu’elles ont de s’adapter aux valeurs, croyances et normes de la société où elles opèrent (Selznick,1957; Scott, 1992, 1995).

Théorie et pratique dialoguent constamment, et si l’une devance parfois l’autre, elle est aussi son moteur. Ecoutons donc les auteurs et les acteurs, car ils reflètent le bouillonnement de la scène sociale !

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