La création de valeur est un enjeu majeur pour les entreprises. Toutefois, la principale interrogation demeure : «Comment créer de la valeur? ». Pour Marx, la valeur correspond à la quantité de travail incorporée à la marchandise. Le système capitaliste actuel, lui, représente l’hégémonie des actionnaires et des marchés financiers. Mais le travail et le capital ne sont pas les seules sources de la création de valeur. En effet, la gestion des ressources humaines, présente dans toutes les activités de base d’une entreprise, constitue un élément clef de ce processus de création de valeur.
Les derniers évènements nous ont démontré la faiblesse du système économique et ont ouvert les portes d’un modèle où l’homme est au cœur de l’organisation. La valeur créée par l’entreprise provient de la capacité des hommes à travailler ensemble. Et cette capacité augmente proportionnellement au bien-être des employés. En effet, pour Jean-François Chanlat, Responsable de l’Executive MBA de Dauphine, le bien-être au travail est la combinaison de quatre éléments. Selon lui :
Les modes de gestion sont un ensemble de pratiques managériales mises en place par une direction pour atteindre des objectifs. Il en résulte un jeu entre charge de travail, degré d’autonomie, degré de reconnaissance et soutien social. C’est l’interaction de ces quatre éléments qui fait plus ou moins le bien-être du collectif.
L’autonomie, liberté qui est laissée aux employés, va être un élément essentiel à leur épanouissement personnel et donc professionnel. Pour Norbert Alter, professeur de sociologie, lui aussi à Paris Dauphine, le management actuel est guidé par l’idée de production lean (« maigre »):
Il faut réduire le plus possible le temps improductif. C’est la lutte contre la flânerie, chère à Taylor. Le problème est qu’une organisation ne peut fonctionner sans une part de « gras »: le temps qui permet des échanges, des initiatives, où s’exprime l’ingéniosité des gens, qui font bien plus que ce qui est prévu par leur contrat de travail. L’organisation « maigre » empêche ce processus. Et fait des dégâts: le travail n’a plus de sens.
En définitive, permettre à ses employés d’avoir du temps pour échanger et cultiver une certaine ouverture d’esprit permet d’augmenter la performance des entreprises. C’est ce type de système que le géant Google a tenté de mettre en place.
Google: du temps libre pour innover
Dans le domaine des ressources humaines tout d’abord, l’entreprise a su réinventer et mettre en pratique la règle des 20% appliquée chez 3M. Elle est principalement basée sur l’organisation bipartite du temps de travail des ingénieurs et des développeurs qui occupent leur temps comme suit :
– 80% du temps de travail est consacré à la mission pour laquelle ils sont payés.
– 20% du temps restant sert aux recherches personnelles.
Cette règle des 20% pousse les travailleurs à s’exécuter plus vite, afin de dégager du temps pour la création personnelle. Création personnelle qui par la suite sera rendue au géant sous forme d’innovations et de contacts. En effet, pendant les 20% de temps dédiés à la recherche, les ingénieurs développent des idées et surtout des produits qui pourront être intégrés dans l’offre de l’entreprise. En outre, Google met à la disposition de ses employés un cadre de travail agréable reposant sur l’instauration des nombreuses activités leur permettant de se sentir bien, de nouer de bonnes relations entre Googlers, mais également de rester plus longtemps sur leur lieu de travail. Loin des clichés des entreprises traditionnelles situées dans des locaux austères, où les cadres sont enfermés dans leur bureau, Google se démarque par son état d’esprit, ses valeurs… Les Googlers ont à leur disposition des salles de jeux, des salles de sport… Ces lieux ont été installés afin de favoriser les échanges d’idées entre employés. En effet, Google considère que « les idées peuvent naitre entre deux portes ».
Pro bono et création de valeur
Mais les idées peuvent également naître de l’interaction entre deux mondes : le monde de l’entreprise et le monde associatif par exemple. Le mécénat de compétences ou le volontariat de compétences sont de nouvelles formes d’échanges permettant à des personnes qualifiées d’approcher différemment leur métier. En effet, les programmes pro bono leur permettent de collaborer avec d’autres dans le but de réaliser un projet impactant pour une association d’intérêt général. En travaillant avec des personnes de divers horizons, les volontaires font usage de leurs compétences et composent avec celles des autres. Ainsi, ils se perfectionnent, mais s’enrichissent également des qualités de leurs collaborateurs. De ce fait, cette expérience participe au processus « d’amélioration continue » des compétences des employés. C’est pourquoi aujourd’hui, les entreprises se rendent compte qu’elles peuvent à la fois rendre service à la société tout en renforçant leur compétitivité. L’engagement des entreprises dans la société est de plus en plus considéré comme un investissement rentable et non plus comme un coût.
En définitive, quelque soit sa place, son rôle au sein d’une entreprise, l’homme est le facteur de création de valeur le plus important mais aussi le plus complexe à gérer. Il convient donc d’en prendre soin et d’instaurer des mesures managériales qui lui permettront de s’épanouir : lui laisser du temps libre afin de favoriser l’innovation, et l’inciter à développer sa capacité à travailler en groupe, par exemple à travers des projets pro bono. A ce sujet, il est certain que les associations auront beaucoup à apprendre aux entreprises, car elles ont su au fil des années développer un modèle basé essentiellement sur l’Homme.
Crédit photo : Champ de blé par êden, sous licence Creative Commons.
Merci pour ce bel article et pour ton blog que je découvre à l’instant.