L’Université d’automne de la Fonda « Faire Ensemble 2020 » a donné l’occasion à de nombreux participants de réfléchir sur des enjeux clefs pour l’avenir des associations et de la société française. Le vendredi 29 novembre, la thématique centrale était « Economie et Inclusion ». Au cours de la matinée, une conférence a permis à des acteurs du secteur de partager leurs lumières autour de cette question : comment promouvoir des modèles économiques au service de l’humain, fondés sur un autre rapport à l’avoir et au travail ?
François Chérèque (Terra Nova et Inspection générale des affaires sociales), Pierre Langlade (Coorace), Bénédicte Menanteau (Admical), Jean-Marc Borello (Groupe SOS), Jean-François Connan (Adecco) et Philippe Durance (CNAM), ont ainsi partagé leurs visions et donné des exemples de réalisations concrètes. Les interventions ont été riches et éclairantes sur les expériences de chacun.Voici quelques points qui m’ont semblé faire consensus au cours des échanges :
La gestion de l’inclusion dans l’économie doit évoluer en même temps que les besoins. François Chérèque appelle à un choc de simplification des dispositifs publics et à une réforme du système de protection sociale. Face aux besoins qui changent, l’administration doit s’adapter et éviter de créer des systèmes dérogatoires. C’est au système de s’adapter aux personnes et non l’inverse. Jean-François Connan explique que l’innovation économique et sociale passe par l’inconfort. Pierre Langlade affirme que l’économie doit être une économie des besoins des individus, et non une économie d’opportunité. Il invite à faire plus confiance à la capacité d’entreprendre des individus et souligne la question que pose, en matière de cohésion sociale, le fléchage des publics vers des dispositifs en fonction de leurs besoins. L’insertion par l’activité économique (IAE) ne doit pas être cloisonnée si les solutions qu’elle apporte avec l’expérience peuvent s’étendre au reste de l’économie.
Les partenariats et les liens entre les acteurs sont décisifs : pour avancer vers l’inclusion, il faut décloisonner et travailler à plusieurs. Jean-Marc Borello évoque la collaboration nécessaire entre les entreprises d’insertion et les entreprises classiques. La difficulté est de travailler systématiquement à 3 : public, privé lucratif et privé non-lucratif pour proposer une qualité de service qui soit identique pour tous les publics, indépendamment de leur solvabilité. Il faut éviter de sectoriser trop le marché et faire appel à la responsabilité de tous avant d’en attendre plus des syndicats ou du monde politique. D’autant plus que bien souvent, les acteurs de terrain sont plus efficaces car plus pragmatiques que les élus, ce qu’affirme François Chérèque. Ce dernier regrette que les entreprises, qui sont pourtant directement concernées par le chômage et la précarité, aient peu participé aux rencontres territoriales de lutte contre la pauvreté organisées par l’IGAS. Bénédicte Menanteau évoque les évolutions du mécénat avec l’engagement d’un nombre croissant de PME qui s’engagent dans des partenariats avec les associations pour répondre aux besoins des territoires. Certains projets comme l’Alliance des Mécènes pour l’éducation fédèrent des entreprises, des associations et l’administration publique. Dans ce cas, l’Education Nationale a donné un accueil favorable. Enfin, Philippe Durance insiste sur l’importance d’associer les citoyens à la définition des politiques publiques, dans une dynamique ascendante.
Les outils ne sont pas bons ou mauvais en soi : dénuée de vision stratégique, leur utilisation ne permet pas d’aboutir à la mise en œuvre d’une politique. Ainsi les modèles économiques peuvent varier, il est important de regarder la façon dont on se sert des outils et les résultats que l’on obtient. Lors des échanges, plusieurs outils sont évoqués. Il serait envisageable de développer une gestion prévisionnelle de l’emploi et des compétences (GPEC) territoriale. L’expérience des Pôles Territoriaux de Coopération Economique, qui permet d’avoir une offre de services répondant aux besoins du territoire, est aussi à observer dans les années à venir. Chez Adecco, un système de zones sous statut commercial à but non lucratif et un partenariat avec 65 agences d’insertion ont permis d’accompagner 120.000 personnes en une quinzaine d’années : les demandes émanent principalement des territoires. Pour Philippe Durance, la pratique de la prospective est très utile dans la création de stratégies partagées entre les acteurs. Elle permet de dépasser une analyse purement économique de la crise et de la considérer comme une opportunité pour dépasser le court-termisme, éviter le conformisme et construire l’avenir.
Il serait artificiel de dresser une conclusion générale de la séance, néanmoins il est évident que tous ces échanges ont ouvert des perspectives nombreuses. Ils permettront sûrement aux acteurs de la société de mieux comprendre les enjeux actuels, et de faciliter la co-construction de leurs stratégies pour oeuvrer ensemble au bien commun. C’est en tout cas l’objectif de la Fonda auquel nous souscrivons, et cette Université d’Automne est un beau pas dans cette direction !