La communication des médias sur le mécénat des fondations et des entreprises est un sujet complexe. Au quotidien, les médias se voient souvent reprocher de traiter uniquement des sujets sur les problèmes et les difficultés de notre société. Pourtant, ils ont un rôle à jouer en étant un relai d’initiatives positives, qu’elles soient civiles, privées ou publique. En ce sens, mécènes et médias ont un rôle commun de catalyseurs et de révélateurs en permettant aux projets de se développer et de se faire connaître.
Une certaine réticence à communiquer positivement
Les journalistes se montrent parfois méfiants, en assimilant le mécénat à de la publicité déguisée ; ils s’abstiennent souvent de nommer les mécènes qui soutiennent des actions d’intérêt général. A l’inverse, il est commun de nommer une entreprise pour ses plans sociaux ou ses dysfonctionnements. Pourquoi dans ce cas ne pas évoquer le fait que celle-ci peut faire aussi du bien?
Le mécénat a longtemps eu la réputation d’être trop bien pour être honnête. Le sujet est souvent évoqué dans la presse nationale sous un angle polémique, on craint une tentation des entreprises de faire du « social washing » et cela alimente une méfiance de l’opinion publique qui assimile souvent les actions de mécénat à de la communication pure déconnectée de la stratégie de l’entreprise. Les sujets qui traitent du mécénat sont considérés comme relativement éloignés de l’actualité et de l’intérêt de l’audience. De plus il est difficile pour les entreprises et les mécènes de trouver le bon interlocuteur dans la mesure où il n’existe pas ou peu de journalistes spécialisés sur le mécénat au sein des rédactions.
Dans cet environnement peu favorable, les entreprises expriment une certaine réticence à communiquer sur leurs actions de peur qu’elles soient mal perçues. Ainsi en 2011, sur 25 entreprises sondées par l’IMS, 63% des entreprises et fondations ne sont pas satisfaites de leurs retombées presse, et 40% ne communiquent pas, ou plus, auprès de la presse[1]. A la télévision, le CSA est aussi vigilant avec cette publicité considérée comme clandestine. Plusieurs porteurs de projets sociaux ou culturels se sont vu refuser de mentionner le nom de leur mécène lorsqu’ils étaient invités sur des plateaux de télévision. D’autres exemples peuvent être cités comme l’obligation de retirer le logo de l’entreprise mécène, pourtant principal financeur d’un film ou d’un documentaire.
Le mécénat crée des passerelles et instaure un dialogue
Pourtant, de nombreux porteurs de projets sociaux, artistes, ou chercheurs doivent en grande partie la réalisation de leur projet grâce au soutien qu’ils ont eu d’une entreprise à travers son mécénat. Il est dommage pour les mécènes que leurs engagements restent dans l’ombre, car les publications sur les actions d’intérêt général ont un impact non négligeable dans la sensibilisation à l’engagement, et soutiennent son développement. Ils permettent surtout l’accroissement de la notoriété du bénéficiaire et de son projet et peuvent faire naître des étincelles dans la prise d’initiative citoyenne et collective. Le mécène a un rôle de détection des projets ayant un potentiel, l’intervention des médias est un fort levier, parfois indispensable pour réaliser ce potentiel.
D’après la charte du mécénat d’entreprise[2], le mécénat créé des passerelles et instaure un dialogue avec les parties prenantes en renforçant l’ancrage de l’entreprise dans son environnement ou son territoire. Il participe à la personnalité de l’entreprise, il est le fruit de son histoire. Ainsi, s’il n’a pas pour objectif direct une retombée presse, il mérite tout de même d’être reconnu. Cette démarche d’instauration de la confiance ne peut se faire que sur du long terme : l’objectif du mécénat étant son impact sur la société, il faut une certaine profondeur historique pour l’apprécier. Le travail des médias sur ces sujets est essentiel, car ils possèdent des qualités d’investigation qui permettent d’évaluer la pertinence et l’impact réel des projets. Les sujets d’ancrage territorial, de solidarité locale, de mécénat ou encore d’impact social sont complexes, mais cette complexité offre aux médias l’opportunité de se différencier en éditant des contenus de qualités sur ces problématiques de société, dans un contexte ou les citoyens n’ont jamais été aussi intéressés par la quête de sens. Espérons qu’ils s’en saisissent !
[1] Etude réalisée par l’IMS auprès des entreprises ayant participé au groupe de travail IMS du 15/11/2011 sur la communication et le mécénat
[2] http://www.admical.org/editor/files/ADMICAL_Charte_du_mecenat_d-entreprise.pdf
Guillaume Deschamps, Chargé de partenariat chez Pro Bono Lab
Cet article a été initialement publié dans Mécènes, le magazine de tous les acteurs du mécénat. Ce trimestriel vous permet d’aborder des sujets de fond, donner des outils pratiques et des exemples inspirants, ouvrir les horizons sur le monde et les multiples partenariats…
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