En 2014, l’ESSEC a réalisé la première étude académique sur l’engagement des collaborateurs, en interrogeant 619 salariés issus de 17 entreprises. En parallèle, le Ministère de la Vie Associative et le RAMEAU ont effectué un travail de consultation des acteurs du secteur qui a permis de construire un rapport interministériel sur l’engagement des actifs. Enfin, l’ADMICAL et Pro Bono Lab ont mené conjointement une enquête auprès de 94 responsables d’entreprises engagées ou non en mécénat de compétences, suivie d’un colloque de témoignages et de partage des savoirs au MEDEF le 5 septembre 2014.
Les points de convergence de ces trois recherches permettent de mieux comprendre l’engagement des actifs et le rôle du mécénat de compétences : voici un résumé.
Les programmes d’implication des collaborateurs doivent donner aux actifs les moyens de mettre en pratique leurs valeurs, de développer leurs compétences et leur sociabilité
Côté collaborateurs, l’étude ESSEC montre que les principales raisons de l’engagement sont la cohérence avec les valeurs du salarié, la possibilité de développer ses connaissances et de progresser sur le plan personnel et social. L’étude menée par l’IFOP auprès des bénévoles dans le cadre du rapport interministériel aboutit a une conclusion proche : en 2014 le premier facteur ayant incité les actifs à consacrer gratuitement du temps à une association réside dans leur volonté de défendre une cause utile aux autres et qui leur tient à cœur (42%), et la seconde motivation est liée au souhait d’appartenir à une équipe partageant un projet commun (41%). Les résultats sont là, car sur les 619 collaborateurs s’étant engagés, 85 % pensent avoir bénéficié de leur engagement à titre personnel, et 71 % pensent que leur entreprise y trouve également un intérêt. Côté responsables d’entreprises, au sein des programmes de mécénat de compétences, les objectifs principaux convergent relativement bien avec ces raisons et motivations individuelles : accompagner les partenaires sociaux - qui sont pour la plupart des associations- puis impliquer et fédérer les collaborateurs.
Un engagement à formes multiples où l’attractivité du projet social et la qualification de l’impact jouent un rôle essentiel pour donner du sens
Une large majorité des salariés s’engagent dans des projets initiés ou proposés par leur entreprise. La plupart des collaborateurs s’engagent sur des projets ponctuels, le temps annuel d’engagement est inférieur à 2 jours pour plus de 40% d’entre eux ; néanmoins environ 30% deviennent très engagés et participent 4 fois ou plus à différents projets soutenus, s’investissant ainsi une semaine ou plus dans l’année. Dans environ la moitié des cas, les projets mobilisent les compétences professionnelles des collaborateurs, et pour 40% environ ils sont réalisés en équipe. Ces estimations convergent dans les études, qu’elles soient réalisées auprès des collaborateurs ou des responsables. De plus, ¾ des salariés interrogés dans l’étude ESSEC jugent que les tâches qu’ils ont à accomplir dans le cadre de leur engagement sont porteuses de sens, et plus de la moitié trouvent également que ces tâches sont variées. Cependant, si les collaborateurs estiment que les projets auxquels ils participent ont un impact, ils sont moins convaincus de leur propre contribution. Cela confirme ce que constatent 50 responsables d’entreprise ayant mis en place le mécénat de compétences : l’évaluation des dispositifs reste à améliorer et le retour d’information à l’issue d’un projet est un élément clef.
Définir précisément le rôle de toutes les parties prenantes
Le rapport interministériel met en avant l’importance de la définition claire des rôles de chacune des parties concernées ; l’étude d’Admical et Pro Bono Lab auprès des responsables d’entreprise confirme que cet enjeu est central. Pour le salarié, il s’agit de trouver un équilibre entre son envie d’engagement et ses contraintes personnelles et professionnelles. Pour l’association ou le bénéficiaire, il faut comprendre les contraintes de l’actif engagé, tout en respectant la nécessité liée à son projet associatif. Pour l’entreprise, il faut avant tout clarifier sa posture et fixer des objectifs clairs et limités, entre l’approfondissement du lien individuel avec ses salariés, ou la volonté d’impulser une dynamique collective. Enfin pour les pouvoirs publics, il s’agit de donner une vision, de fixer un cap qui permette à tous de mieux valoriser et de reconnaître le rôle de l’engagement dans la société.
Le mécénat de compétences, une opportunité de développer l’engagement des actifs en donnant un périmètre et des objectifs clairs
Renforcer le mécénat de compétences est une préconisation soulignée par le rapport interministériel. En effet, ce dernier s’avère un outil utile pour mieux délimiter les rôles : ainsi les 2/3 des responsables d’entreprise l’ayant mis en place indiquent avoir formalisé leur dispositif de mécénat de compétences ; et parmi les entreprises qui ne l’ont pas encore mis en place, environ 35% pensent l’avoir fait d’ici à 3 ans. Cependant, il convient de limiter l’interférence avec le travail salarié en favorisant notamment l’initiative individuelle autonome sans pression du management direct. Il est aussi pertinent que le mécénat de compétences cible les actions où l’entreprise a sa pleine légitimité : aide à la gouvernance et au pilotage des associations, et/ou apport d’expertises et de savoir-faire spécifiques en lien avec les métiers de l’entreprise – ces engagements dits « pro bono ». Alors, le mécénat de compétences peut constituer une véritable porte d’entrée pour que l’actif fasse ses premiers pas dans l’engagement associatif.
Antoine Colonna d’Istria, Co-fondateur - Pro Bono Lab
Cet article a été initialement publié dans Mécènes, le magazine de tous les acteurs du mécénat. Ce trimestriel vous permet d’aborder des sujets de fond, donner des outils pratiques et des exemples inspirants, ouvrir les horizons sur le monde et les multiples partenariats…
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