S’engager, les enjeux de la nouvelle génération


le 25 février 2016 dans Bénévolat de compétences, Les tendances, Pourquoi s'engager - No comments

« Mais pourquoi vous-êtes là, un samedi matin ? » Alors que l’on venait de commencer la séance dans les locaux de Pro Bono Lab aux côtés de l’équipe de Rose Magazine, bien décidés à les aider dans la construction du site internet de leur nouveau magazine BLU destinés aux hommes atteints de cancer, cette question, énoncée à haute voix et en toute innocence par la directrice de rédaction du magazine nous a tous pris de court, il faut l’avouer. C’est vrai, au fait, pourquoi sommes-nous là ? Chacun s’est observé, sondant dans le regard de l’autre la raison qui aurait pu le pousser à être là, un samedi matin, prêt à donner l’intégralité de sa journée de repos ô combien précieux pour les parisiens pressés que nous sommes. Puis les premières réponses ont commencé à fuser, timides, comme si la question était trop personnelle pour être posée si ouvertement. Car au-delà des réponses évidentes - « mais rendre service bien sûr ! » - se pose véritablement la question du POURQUOI rendre service ?

Lorsqu’on s’engage en 2016, même de manière ponctuelle comme c’était le cas lors de ce marathon probono, pourquoi le fait-on ? Quelle motivation avons-nous (ou nous faut-il) pour sauter le pas ? Avec mon regard de jeune femme du XXIe siècle, je propose de poser ici les questions qu’ont suscitées cette journée, en tentant d’y apporter des réponses tirées de mon expérience personnelle et ainsi alimenter la réflexion sur ce sujet.

Pourquoi s’engager quand on est jeune en 2016 ?

16Il se trouve que le nombre de jeunes qui s’engagent bénévolement ne cesse d’augmenter depuis plusieurs années, tout niveau social confondu (comme le souligne le rapport de France Bénévolat paru en 2014 sur l’engagement bénévole associatif). Je choisis de me concentrer sur la jeunesse car je fais partie de cette frange de la population des 18-35 ans (et aussi parce que 98% des bénévoles autour de la table ce jour-là avaient moins de 35 ans !), mais également pour le plaisir de battre en brèche l’idée qui voudrait que notre génération soit une génération individualiste qui ne s’engage pas (ou plus). Si l’engagement bénévole a évolué depuis près de 50 ans, passant d’un engagement collectif guidé par l’envie d’offrir un nouveau modèle de société, à un bénévolat plus individuel, plus ponctuel, il est intéressant de souligner que cette manière d’interagir avec nos pairs n’a pas connu de crise (même si bien sûr le secteur associatif souffre toujours de moyens humains, financiers…).

De nouvelles structures qui répondent à l’envie d’engagement des jeunes

Alors comment une structure telle que Pro Bono Lab peut fonctionner et mieux encore, avoir un tel vivier de bénévoles ? Et ils ne sont pas les seuls : Welp, MakeSense… Tous ces organismes créés depuis moins de 5 ans fonctionnent sur le désir de bénévoles d’épauler des associations, des start ups, en offrant leurs compétences pour répondre à des problématiques concrètes en matière de communication, de management, tout cela dans une relation win-win : je te donne et j’apprends moi-même à développer des compétences. Mais il me semble qu’au-delà des bénéfices professionnels qu’une telle expérience peut apporter, ce fonctionnement se nourrit également d’une quête de sens, sentiment partagé par une génération connectée qui a des envies de changer le monde et l’entreprise, de trouver une raison à son travail et qui se dit prête à s’investir pour quelque chose de nouveau et d’éthique, pour peu qu’on lui en donne la possibilité et qu’on l’y amène de manière simple.

hand-garden-flower-dandelionPour cela, la méthodologie professionnelle de ces structures est un véritable plus. Très présentes sur les réseaux sociaux pour la plupart, elles sont capables de mettre en place des campagnes de « recrutement » efficaces et percutantes, doublées d’un véritable accompagnement des bénévoles pour les guider dans le choix de la mission qui leur correspondra le mieux. Grâce à un diagnostic établi en amont avec l’association à aider, la concrétisation de la mission se fait se manière fluide, en pleine connaissant des besoins de l’association et du contexte dans lequel sa demande s’insère.

Mais le plus surprenant dans cette histoire est la capacité d’organismes tels que Pro Bono Lab à nous convaincre de nous investir pour une cause que nous ne connaissions pas quelques jours auparavant (comme c’était le cas pour ma part concernant Rose magazine) et de nous amener à donner notre richesse, à savoir notre temps. Notre nouveau modèle de société très fortement impacté par le collaboratif, « l’ubérisation » de l’économie, le partage de données, d’appartement, de voiture… nous aurait-il appris à être moins inquiet de l’inconnu, de l’inhabituel, de l’instantané ? A désirer tenter de nouvelles expériences et à s’investir dans un projet soutenu et porté par une communauté ? Les réseaux sociaux sont sans doute également responsables de l’avènement de cette « solidarité collectivité », émotionnelle, immédiate. En témoignent les évènements de soutien qui se sont multipliés sur la toile suite aux attentats de Charlie Hebdo et ceux plus récents en novembre dernier.

Alors que l’engagement peut être perçu comme source de contrainte et d’angoisse (pour preuve : le changement de discours chez les opérateurs téléphoniques qui mettent en avant leurs abonnements garantis SANS engagement, comme pour retenir le consommateur effrayé par ce mot barbare), cette notion est me semble-t-il en train d’évoluer et ne revêt pas la même signification aujourd’hui qu’hier. Un article paru dernièrement dans La Tribune m’a intriguée : « L’histoire méconnue des super-héros français ». Emmanuelle Duez, serial entrepreneuse convaincue que la Génération Y est la cause et la conséquence du changement radical de notre société, y fait le portrait de ces jeunes de la Marine nationale partis s’engager alors qu’ils n’avaient que « quelques poils au menton », pour pouvoir se donner « sans réserve, sans avoir rien à gagner ». Si cette figure de l’engagement militaire paraît éloignée de nos préoccupations quotidiennes actuelles, le fait que ces vocations existent encore me conforte dans l’idée que l’engagement n’est pas mort, bien au contraire, mais qu’il nécessite seulement de trouver des nouvelles manières de s’exprimer.

Icone_VolontairesCamille Guyon, volontaire Pro Bono Lab

 

 

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