Prendre l’initiative de proposer un projet pro bono est une responsabilité importante : il s’agit de mener le projet à bien, donc de définir les enjeux à chaque étape. Il faut disposer des compétences requises et de la disponibilité en temps nécessaire afin de maintenir un accord tout au long du projet en proposant à chaque acteur de réaliser le travail qui correspond à son rôle et à ses motivations.
Cet article est le second d’une série analysant les enjeux de la préparation d’un projet pro bono en 4 étapes : Comprendre, Proposer, Prévoir, Lancer
Les étapes Comprendre et Proposer s’inscrivent dans un processus dynamique. C’est en soumettant ses propositions à la critique de l’association et des autres parties (volontaires, entreprises…) et en les adaptant qu’un bon directeur de projet pro bono pourra finalement comprendre les enjeux pour concevoir un projet juste, faisable, et intéressant pour tous les acteurs.
Voici quelques conseils et idées pour proposer des projets qui correspondent aux attentes et aux exigences des différents participants aux projets pro bono.
Volontaires
La première motivation exprimée par les bénévoles français est de se rendre utile, mais les principales motivations pour les bénévoles de compétences en particulier sont le focus sur la compétence et la flexibilité de l’engagement. Qu’ils effectuent leur projet dans le cadre du bénévolat ou du mécénat de compétences, l’engagement de volontaires pro bono porte en général quelques exigences supplémentaires par rapport à l’engagement bénévole traditionnel. Pour plus d’informations sur les motivations de l’engagement bénévole en France, voire l’étude Repères sur le bénévolat 2010 .
1 – Temps et responsabilité
Une proposition doit clairement définir la durée du projet, ses différentes étapes, et la répartition des rôles. Comme les bénévoles, l’engagement de volontaires pro bono est soumis aux contraintes d’emploi du temps (lire Le temps, denrée rare et précieuse pour le volontaire). Une logique de projet à durée déterminée permet de rendre l’engagement flexible et périodique, cependant les contraintes peuvent être perçues comme accentuées lorsque les volontaires utilisent leurs compétences professionnelles. L’engagement prend alors du sérieux et perd un côté loisir et découverte qu’une action sans lien avec leur métier possède, par exemple lorsqu’elle est réalisable avec des proches. La compétence du volontaire s’inscrit dans une organisation de projet où elle devient rapidement cruciale. La responsabilité du volontaire s’en trouve augmentée, car le bon déroulement du projet dépend de son action individuelle, on ne peut le remplacer aisément et on attend sa contribution pour avancer. Cependant, l’engagement du volontaire doit au moins couvrir toute la période du projet, souvent plus longue qu’un bénévolat ponctuel. Afin que l’indisponibilité soudaine ou l’abandon d’un volontaire ne compromette pas la réalisation d’un projet en cours, il est souhaitable de discuter avec le volontaire en amont du projet des solutions envisageables en cas d’imprévu qui l’empêcherait d’accomplir son rôle. Demander à un volontaire de recommander des collègues ou des proches susceptibles reprendre le flambeau est souvent une solution satisfaisante.
2 – Valeurs
En particulier dans le cas de mission en équipe, il est important de déterminer des valeurs guidant l’action des volontaires, voire de préparer une charte à laquelle se référer en cas d’hésitation. L’association bénéficiaire doit connaître et accepter ces valeurs portées par l’équipe pro bono, qui justifieront la méthode employée pour mener le projet. Quelque soit l’intérêt du projet pour les volontaires, il est notamment fondamental de maintenir une optique d’engagement et de service utile au bénéficiaire. L’équipe pro bono ne travaille pas pour elle-même, mais bien pour se rendre utile !
3 – Ecoute et reconnaissance
Il est important de proposer aux volontaires une position où leur travail sera reconnu. Au cours d’un projet pro bono, les volontaires utilisant leurs compétences exposent plus leur personnalité qu’un bénévole effectuant une action manuelle directement gratifiante mais moins individuante. En utilisant leurs talents, les volontaires essaient de donner un maximum de valeur à leur action et à leur temps, et ils seront d’autant plus sensibles à la reconnaissance et au respect de cette valeur qui est la leur. Pour réussir un accord sain, les volontaires doivent résister à toute tentation d’imposer leurs vues à l’association, mais celle-ci devra en échange témoigner d’une réelle force d’écoute et d’adaptation pour les satisfaire. Si le volontaire mène son projet pro bono en mécénat de compétences, il est important pour lui que son entreprise reconnaisse aussi son implication, voir à ce propos : Reconnaître l’engagement pro bono des volontaires : pourquoi, comment ?
4 – Invitation opportune
Il est peu fructueux d’appeler à l’aide des volontaires pro bono pour une urgence, surtout si la situation ne requiert pas leurs compétences. Seule une invitation adaptée et compréhensive permet d’accueillir les volontaires et de créer un cadre propice au projet. Trois critères permettent d’évaluer si une situation est favorable pour les volontaires, afin qu’ils aient l’envie et la capacité de mener un projet. Pour avoir un impact stratégique satisfaisant et susciter l’envie des volontaires, l’urgence d’un projet pro bono doit être faible tandis que son importance pour l’association et le niveau des compétences mobilisées doivent être fort.
HandsOn Suburban Chicago a résumé graphiquement ces critères de sélection d’un bon projet pour des consultants pro bono. Les zones 1 et 2 sont celles des projets à choisir en priorité !
Associations
Les attentes des associations et des responsables associatifs sont souvent assez différentes de celles des volontaires. Deux études menées par Recherche et Solidarités décrivent les priorités en matière de bénévolat, ainsi que l’approche du bénévolat d’expertise par les responsables associatifs en France. La principale attente des responsables associatifs vis-à-vis des bénévoles est de les associer au projet associatif, ce qui ne correspond pas toujours à l’engagement flexible et varié recherché par certains volontaires pro bono.
1 – Adhésion des acteurs
L’attente des responsables se comprend, car l’association doit intégrer réellement le projet pro bono et les volontaires pour que leurs compétences puissent avoir un effet maximal. Toutes les personnes concernées au sein de l’association doivent connaître et accepter le projet. La validation initiale d’un dirigeant de l’association et l’adhésion du bureau sont notamment indispensables. Il faut ensuite proposer le projet aux parties concernées par son impact et par sa réalisation, afin qu’elles puissent suivre et valider le travail des volontaires et que le projet progresse en respectant le fonctionnement régulier de l’association.
2 – Formalisation de la proposition
Pour construire une relation de long terme, l’association doit aussi être à même d’évaluer les avantages qu’elle retire d’un projet, et quel est l’investissement en temps nécessaire. Un bon projet fait tout d’abord l’objet d’une proposition formelle, qui devrait contenir au moins :
- Descriptif technique : cadre et durée du projet, nombre, profils et compétences des volontaires, nombre d’heures prévues, répartition des rôles, motivations et méthode
- Liste des personnes à mobiliser au sein de l’association et responsabilités
- Liste de livrables, étapes et objectifs clairs pour le projet
- Ebauche d’une méthode d’évaluation chiffrée de la réussite et de l’impact du projet
- Plan de valorisation du travail réalisé pour assurer la durabilité de l’impact et la transmission de la valeur créée au sein de l’association
- Moyens utilisés pour reconnaître et récompenser l’engagement des volontaires
Partenaires
Afin d’assurer la réalisation d’un projet, il est très intéressant de trouver un ou plusieurs soutiens extérieurs. Le soutien peut être financier, en nature, ou encore en compétences. Son rôle n’est pas à négliger, il sera bien souvent le garant de la réussite du projet ! Il faut donc définir les besoins du projet qui peuvent être satisfaits par un partenaire : des ressources matérielles, humaines, ou la couverture des frais engagés. Il faut ensuite comprendre ce qui pourrait susciter l’intérêt de partenaires pour le projet pro bono. Cela permettra de savoir qui cibler lors d’une recherche de partenariat, pour trouver l’adéquation bénéfique pour l’association, les volontaires et les partenaires du projet. La création d’une valeur partagée est nécessaire pour créer une relation de confiance durable, qui puisse pérenniser le projet et permettre une amélioration continue au fil du temps et de l’expérience.
Les enjeux pour proposer des partenariats fructueux à d’autres acteurs que les associations et volontaires sont nombreux. Ci-dessous, nous listons simplement quelques difficultés de compréhension à lever pour expliquer à un potentiel mécène ou parrain pourquoi soutenir en particulier un projet pro bono :
1 – La spécificité du pro bono
Il s’agit de faire comprendre au partenaire la différence entre un projet tactique et un projet stratégique. Le pro bono recherche un impact davantage stratégique que le bénévolat traditionnel qui relève plutôt de l’action tactique tel qu’il est pratiqué aujourd’hui. En ce sens, un projet pro bono développe les capacités des personnes morales (associations) à moyen et long terme, c’est un impact structurel et indirect, alors que les projets de bénévolat classique sont généralement des projets de plus court terme, qui profitent à directement à des personnes physique (directement aux bénéficiaires ou à des salariés de l’association).
2 – La création de valeur partagée
Il est essentiel d’introduire la notion de valeur partagée pour toutes les parties prenantes, définir quelles seront les méthodes employées pour assurer un projet gagnant-gagnant-gagnant et pour en mesurer le succès. Expliquer que le pro bono développe les compétences des volontaires.
3 – Les différents types de soutien possible et leurs enjeux
Il est également important de clarifier les enjeux légaux du soutien et vérifier l’adéquation à la situation du partenaire du projet, par exemple à sa culture d’entreprise, à son mode de fonctionnement habituel, à son coeur de métier ou à l’objet d’une Fondation le cas échéant, avant de demander un soutien précis : mécénat financier, mécénat en nature, mécénat de compétences, parrainage, support technique ou partage de visibilité…
4 – La proposition de valeur
Enfin, présenter une proposition de valeur claire et pertinente au partenaire est primordial pour convaincre. Il faut pour cela définir précisément ce que gagne le partenaire à soutenir le projet, connaître son cœur de métier, sa culture, ses valeurs et ses motivations. Dans le cas d’une entreprise, plus d’informations sur les bénéfices du pro bono dans notre catégorie entreprise !
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